Côte d'Ivoire: un espoir renaît pour les enfants de la rue d'Abidjan
Dans les artères d'Abidjan, plus de 16 300 enfants survivent dans la rue, victimes d'un système qui les abandonne. Mais une lueur d'espoir traverse cette réalité cruelle: un programme de protection tend enfin la main à ces jeunes âmes brisées par la pauvreté et l'exclusion.
Comme les premières pousses qui percent l'asphalte des villes, l'espoir renaît dans les rues d'Abidjan. En 2023, le ministère ivoirien de la Femme, de la Famille et de l'Enfant a recensé cette tragique réalité: plus de 16 300 enfants vivent dans la rue à travers dix villes du pays. Ces petits êtres, arrachés trop tôt à l'innocence de l'enfance, dorment sur les trottoirs froids, survivent de mendicité ou de petits travaux précaires.
Les gardiens de l'espoir sillonnent la ville
Tel un fleuve nourricier qui irrigue la terre assoiffée, le Programme pour la protection des enfants et adolescents vulnérables déploie ses équipes dans les quartiers oubliés. Ces nouveaux gardiens de l'espoir arpentent les rues avec la patience du cultivateur, scrutant chaque recoin où la misère cache ses plus jeunes victimes.
"Ce sont les mineurs qui sont recherchés. Celles qui vendent l'eau, qui ont l'âge d'aller à l'école et qui sont dans la rue. Et puis au niveau des jeunes garçons, ceux qui sont entre les véhicules en train d'essuyer les pare-brise", explique Seaty Ebert, conseiller d'éducation, dont les mots portent la tendresse d'un père pour ses enfants perdus.
Ce matin-là, la récolte est douloureuse: deux fillettes contraintes à mendier, un petit vendeur de chips, un garçon fiévreux gisant sur le bitumen. Autant de vies brisées par un système qui privilégie le profit à l'humain, l'accumulation à la solidarité.
Yopougon, terre de renaissance
À Yopougon, le centre d'écoute et d'orientation devient un sanctuaire de résilience. Ici, loin du vacarme de la rue et de ses dangers, les enfants retrouvent ce qui leur avait été volé: la dignité d'un repas, la douceur des soins, l'écoute bienveillante de psychologues et d'éducateurs.
"Chaque enfant est un cas spécifique pour nous", précise Mamadou Touré, responsable du centre, rappelant cette vérité fondamentale que nos sociétés oublient trop souvent: chaque être humain mérite une attention particulière, un chemin vers la reconstruction.
Le dispositif porte ses fruits comme un baobab généreux: plus de 4 000 enfants ont été arrachés à l'enfer de la rue ces deux dernières années. Mais les racines du mal plongent profond dans le terreau de nos inégalités: pauvreté familiale, violences domestiques, ruptures sociales.
Les résistances de la liberté retrouvée
Le sociologue Bini Koffi éclaire cette complexité avec la sagesse de celui qui comprend les méandres de l'âme humaine: "Un enfant qui s'est autonomisé dans la rue, qui a l'habitude d'agir seul et qui est libre de ses actions, si vous le remettez dans une situation familiale, il est évident qu'il y aura un clash."
Cette résistance révèle une vérité amère: ces enfants ont appris à survivre dans un monde qui les rejette, développant une forme de liberté sauvage que nos structures peinent à apprivoiser.
Démasquer les prédateurs
Les maraudes ont également révélé l'existence d'un réseau d'exploitation ignoble: des adultes sans scrupules utilisent des enfants venus de pays voisins pour la mendicité. En fin 2023, 18 prédateurs ont été interpellés, rappelant que derrière chaque enfant des rues se cachent souvent des intérêts économiques sordides.
Cette initiative ivoirienne nous rappelle qu'au-delà des frontières, nous partageons tous la même terre, les mêmes responsabilités envers nos enfants. Elle nous enseigne qu'un autre monde est possible, où la solidarité l'emporte sur l'indifférence, où chaque enfant peut retrouver sa place dans la grande famille humaine.